Droits d’auteur : brouille entre « Has been » et « No name » à la Sonacam

Cela fait des années déjà que l’artiste musicien camerounais a mal dans son métier et dans ses droits. Il n’est pas payé convenablement, n’a pas de vraies salles de spectacles, a des possibilités très réduites de faire de vrais spectacles ici et ailleurs. Une réalité qui a obligé beaucoup à n’avoir que la répartition du droit d’auteur comme seule source de revenus. Cependant, depuis la fin de l’ère CMC, on peut difficilement parler de répartitions au Cameroun. Il serait beaucoup plus juste de parler de redistribution. Une redistribution dont le contrôle, aujourd’hui, abouti à une lutte sans merci entre « Has been » et « No name ».




Un Organisme de Gestion Collective (OGC) est une entreprise privée dont la principale activité est le recouvrement des droits de ses ayant-droits qui sont ses actionnaires, qui lui ont cédé au préalable le droit de collecter leur argent et de défendre leurs droits, auprès des utilisateurs et consommateurs publics et privés de leurs œuvres. C’est cette collecte qui permet à l’entreprise de se développer pour toujours ratisser large sur tout le territoire national et à l’international. On parle ici de milliards en  liquide, dont le contrôle, depuis des décennies, divise les artistes. C’est tout l’argent que perçoivent les artistes musiciens hors des cachets des événements et des dérivés de leurs images et de leurs œuvres. On parle de l’argent des grosses firmes établies dans notre territoire telles que SABC, Orange Cameroon, Guiness, MTN Cameroon, les médias (CRTV, Canal2International), les hôtels, les bars, les restaurants, les importateurs de consommables électroniques (clés USB, portables, disques durs, iPod, etc.), les transporteurs (taxi de ville, transporteurs interurbains, trains, aéroports et compagnies aériennes). On parle d’une entreprise qui, si elle est bien gérée, pourrait distribuer des millions de FCFA à ses ayant-droits.

Mépris sans vergogne des droits

Mais au lieu de se concentrer à ratisser bien large pour récupérer beaucoup plus d’argent, les gestionnaires de la Société nationale de l’art musical, la Sonacam, comme ceux de la défunte Société camerounaise de l’art musical (Socam), et de la défunte Cameroon Music Corporation (CMC), ont passé jusqu’ici le temps aux guéguerres intestines bien dévastatrices. Hier, c’était Sam Mbendè qui a été torpillé alors qu’il gérait la CMC, accusé de vol. Puis ce fut le tour de géant Manu Dibango, accusé sans preuve d’avoir distrait des millions. Est venue ensuite Odile Ngaska que l’on accuse avoir quitté le pays avec des millions des artistes, alors qu’elle gérait la Socam. Prince Ndédi Eyango qui va la remplacer n’y fera pas 6 mois, piégé par sa double nationalité.




Aujourd’hui, à l’ère de la Sonacam, on voit des copains soudés pour manger aussi, comme d’autres ont fait une fois que « l’occasion » leur a été offerte, contre des anciens copains ou éternels rivaux qui les vilipendent à tort ou à raison dans les médias pour avoir leur part du gâteau. En fait, depuis plus d’une vingtaine d’années, aucune OGC des artistes musiciens n’a fonctionné avec transparence, dignité et pour le bien-être de l’artiste. Ses administrateurs se sont contentés de n’y voir qu’une opportunité de se faire des sous, avec la complicité des grands commis de l’Etat. Alors qu’une OGC doit être gérée par de vrais techniciens de la gestion des entreprises, au Cameroun, des artistes ont décidé de le faire par eux-mêmes, avec ou sans compétence, au détriment de toute concentration à la production de leurs nouvelles œuvres. Des clans se tissent à chaque nouvelle administration, des clashes dans les réseaux sociaux remontent la hideur nauséabonde des plaies béantes de ce corps de métier, ô combien noble.

 L’argent, toujours de l’argent à prendre

L’art doit plutôt offrir le rêve pour la bonne santé de toute la société, voire pour la brillance de l’image du Cameroun, loin de ce que l’on lit, écoute et entend à chaque redistribution des redevances. Tout ceci est le fruit d’un grand vol bâti sur des fondations d’une injustice létale. Le clan des « Has been », ces anciennes gloires de la musique, parfois auteur d’un seul 45 tour en 30 ans, vivent pendant des années du fruit des productions des œuvres de l’esprit des autres, parce que devenus des administrateurs grassement payés, lutte contre celui des « No name en panne d’inspiration, qui font tellement du bruit dans les réseaux sociaux, alors que personne ne peut mimer un seul de leur titre. Des fois même, personne ne les connait de visage.




Au milieu, dans la neutralité, des artistes qui continuent à produire des œuvres, loin du bruit des cancres du métier qui n’ont vu en la gestion d’une OGC qu’une bonne porte de sortie d’une misérable carrière sans vraie inspiration, avec pour seules atouts leur chance du débutant et la carte de visite actuelle. Tenez ! Monsieur Sam Fan Thomas, l’actuel PCA de la Sonacam, du haut de ses 68 ans, a fait plus de 45 tours et des cassettes que d’album à 7 titres sur CD ? Avec un peu moins de 10 albums au total, il trône à la tête de cet organisme en niant ses droits à ceux qui ont fait le même parcours que lui, et bien pire encore, à ceux qui ont fait plus que lui dans la musique (Marthe Zambo) et continuent encore à pondre des œuvres en 2020, alors même que lui, depuis plus de 20 ans n’a aucun nouveau titre sur le marché ?

Les oubliés des droits d’auteur

Son principal contradicteur de la dernière distribution est dans les réseaux sociaux, monsieur Djènè Djento, le père du titre à succès « Débroussaillez ». Ce dernier n’a pas un seul nouveau titre sur le marché depuis presque 30 ans ! Autour de ces 2 meneurs de camps qui ostracisent la gestion des droits d’auteur, la confisquent et bataillent pour des sous, des personnes qui parfois n’ont jamais fait un seul album de toute leur vie. Sont dans l’oubli, leurs noms sortis de la liste des ayant-droits de cet OGC qui est pourtant né en assemblée nationale extraordinaire qui se voulait conciliante et globalisante pour le bien de tous les artistes musiciens, la majorité de tous ceux qui ont donné ses lettres de noblesse à la musique camerounaise : les pères du Makossa, les seigneurs du Bikut-si, les pionniers des folklores du terroir de l’Ouest, du Grand-Nord ou de l’EST et d’ailleurs.




Pour quelle raison ? Pour n’avoir pas rempli de la paperasse alors que cette société, elle, dans les médias, bars, restaurants, chez les importateurs de consommables informatiques, SABC, Orange, MTN, Nexttel et autres grands hôtels et cabarets des villes et villages récupérer de l’argent, sans distinction de produits et de leurs auteurs, compositeurs et éditeurs ? Qui peut dire l’audio qui se retrouverait dans une clé USB ? Ceci relève de l’incompétence des gestionnaires de la Sonacam. Ils ne font pas mieux que les précédents, tout simplement. Et l’on comprend, sans toutefois le justifier, le tôlé que font les interventions de certains ténors de la musique camerounaise, dont les « voices » sur des groupes Whatsapp et Facebook ne cessent de surprendre dans ce corps. Dans la mangeoire hier, affamés aujourd’hui, beaucoup ne veulent pas que cela change, mais juste avoir leur part.

Attention à la paix sociale

Est-il donc sérieux que certains illustres inconnus n’ayant aucune chanson qui joue dans les médias et autres lieux de réjouissance, touchent 700 000 F CFA, là où les artistes à succès, ceux qui ont plus de 10 albums de moins de 15 ans de vie sur le marché, touchent 50 000 FCFA ? Voilà à quoi ressemble à ce jour la gestion collective des droits d’auteur au Cameroun. Une gestion sous fond clanique, sans feuillet des répartitions à même de justifier le partage. Une fois de plus, on est en face d’une distribution de l’argent issu des efforts et de la sueur de toute une corporation aux copains. Une bombe sociale à retardement.




Dans un « voice » qui passe dans les réseaux sociaux, Prince Ndédi Eyango se dit « sidéré » par les propos contenus dans celui de son aîné Isidore Tamwo qui rejette plutôt le tort d’une telle gestion au président de la commission des répartitions. Il traite ses propos « d’inepties », une fois que celui-ci demande à voir les « preuves de détournement pour adhérer aux revendications » des artistes. Il parle même de « guerre » contre les gestionnaires actuels, aussi longtemps que ledit PCA ne déposera pas son tablier. Selon lui, « San Fan Thomas doit connaître qui entre en répartition et qui n’est pas rentré en répartition. Il doit vérifier tout ce qui sort, portant le nom de la Sonacam, parce que c’est lui le responsable de la Sonacam … Il est incompétent ». On note le silence du PCA San Fan Thomas. Certains de ses proches collaborateurs parlent d’assainissement du fichier de l’OGC. Une justification qui tiendrait si les feuillets étaient mis à la disposition de tous dans une gestion ouverte des Droits d’auteur.

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